Un débat d’orientation et un budget 2025 caduc avant sa présentation

Les débats d’orientations budgétaires 2025 du Département se sont tenus ce jour dans un climat inédit alors que la loi de finances 2025 n’était pas encore votée. Pire, personne ne peut dire qu’elle en sera sa teneur alors que l’Etat demande 5 milliards d’euros aux collectivités locales.

Malgré notre demande de report adressée à la Présidente, l’exécutif maintien sa volonté de voter le budget primitif du Département les 16 et 17 décembre malgré les incertitudes majeures qui pèsent sur la politique nationale et ses répercussions au niveau des recettes de la collectivité.

La justification est louable : entamer un acte de « résistance » face .. à la propre famille politique de la majorité qui met en péril la poursuite des actions menées par le Département en le contraignant à mener une politique de rigueur. Mais ce choix condamne le Département à préparer un budget 2025 caduc avant même sa présentation.

Plutôt que de toujours chercher des économies, pourquoi ne parle-t-on jamais des recettes ? Pourquoi ne pas revenir à une fiscalité plus juste, en imposant davantage les plus riches, qu’il s’agisse des ménages ou des grandes entreprises ? C’est par cette voie que nous pourrions réellement financer les politiques publiques dont notre pays a besoin, et non en étranglant les collectivités.

Discours liminaire de Magali Duvernois

Madame la Présidente,

Mesdames et Messieurs les Conseillers départementaux, chers collègues,

J’étais tentée de commencer ce liminaire par « on vous l’avait bien dit » et reprendre cette expression comme un leitmotiv tant ce qui nous arrive aujourd’hui était prévisible.

En effet, on nous répète souvent qu’il faut parler de politique locale et oublier la politique nationale. Mais soyons clairs : en ce jour, où nous devons débattre des orientations budgétaires pour 2025 ; nous ne pouvons plus l’ignorer : les décisions prises à Paris ont des conséquences directes sur notre budget ici, dans le Doubs. Le gouvernement nous demande 5 milliards d’économies. Ce n’est rien de moins que le résultat d’une politique fiscale catastrophique menée depuis plusieurs années. Une politique fiscale qui interroge systématiquement les dépenses pour mieux cacher les cadeaux faits aux plus riches.

Prenons un exemple simple. Le gouvernement demande 5 milliards d’économies aux collectivités locales alors que la suppression de la CVAE, cette taxe sur la Valeur Ajoutée des Entreprises représente un manque à gagner de 9 Milliards soit quasiment le double de ce qui est demandé aux collectivités locales. Mme la Présidente, chers collègues de la majorité, nous aurions pu croire en votre indignation face aux efforts demandés aux collectivités mais, mais, lorsque nous vous avions proposé une motion dénonçant la suppression de cette taxe, vous aviez refusé de la voter en arguant le fait qu’il fallait laisser le gouvernement, votre gouvernement  de droite puisqu’il avait promis de compenser cette perte pour les collectivités …. Nous voyons le résultat un an après  !!!!

Force est de constater que cette promesse n’a pas été tenue et que c’est nous, collectivités locales, qui payons aujourd’hui le prix de ces choix.

Plutôt que de toujours chercher des économies, pourquoi ne parle-t-on jamais des recettes ? Pourquoi ne pas revenir à une fiscalité plus juste, en imposant davantage les plus riches, qu’il s’agisse des ménages ou des grandes entreprises ? C’est par cette voie que nous pourrions réellement financer les politiques publiques dont notre pays a besoin, et non en étranglant les collectivités.

Nous devons arrêter cette politique fiscale qui a vu progressivement les plus riches et les grandes entreprises payer de moins en moins d’impôts : faut-il rappeler la suppression de l’ISF, l’instauration de la FlatTax et la CVAE dont je viens de parler… Ainsi, l’Observatoire des inégalités, confirme que les 500 plus grandes fortunes ont vu leur patrimoine multiplié par 4 en 10 ans, que les 10 premiers Milliardaires ont vu leur fortune doublée oui doublée depuis 2017 ; les plaçant ainsi parmi les plus riches au monde. Dans le même temps, le taux de pauvreté a augmenté atteignant 14,5 % , touchant notamment les jeunes et les familles modestes. Les enfants de moins de 18 ans étant particulièrement touchés avec un taux de 20,4 % . Et aujourd’hui, comble du cynisme, ce sont toutes ces personnes fragiles qui risquent d’être encore plus fragilisées. 

En effet, il est important de rappeler que les départements supportent aujourd’hui plus de 40 % de l’effort demandé aux collectivités territoriales. Cet effort, disproportionné, met en péril nos politiques de solidarité. Ne l’oublions pas, c’est le département qui gère le RSA, la protection de l’enfance, l’aide aux personnes handicapées et aux personnes âgées.

 En fragilisant ces budgets, ce sont ces citoyens que nous abandonnons. Ce sont les personnes les plus précaires que nous pointons du doigt comme boucs émissaires.

Et ne faisons pas l’erreur de les stigmatiser davantage. On parle souvent de fraude sociale, mais rappelons les chiffres : la fraude aux prestations sociales représente 1,1 milliard d’euros, contre 15,2 milliards pour la fraude fiscale. Où est le vrai scandale ? Et pourtant, près de 30 % des ayants droit n’accèdent même pas aux prestations sociales qui leur sont dues, notamment 34 % pour le RSA et 50 % pour le minimum vieillesse. Ce sont 4 milliards d’euros en 2022 qui ne sont pas réclamés.

Cette politique d’austérité brutale alimente également la montée de l’extrême droite. Le Rassemblement National, loin de défendre les collectivités locales, a demandé encore plus d’efforts de leur part. Ils ont proposé 15 milliards d’économies supplémentaires pour les collectivités locales lors de la présentation de leur contre-budget à l’Assemblée Nationale. Cette surenchère d’austérité fragilise encore plus nos territoires et nos services publics, tout en nourrissant un discours populiste dangereux. Et comble de l’immoralité, le RN attise la haine des plus fragiles pour récupérer leurs voix alors que ce sont eux qui les plongent dans une précarité toujours plus grande.

Le sacrifice de nos politiques publiques fait ainsi craindre le pire pour l’avenir, y compris la poursuite de la montée des extrêmes. Et n’oublions pas, cette cure d’austérité drastique fait peser une menace sur l’existence même des départements.

 Le gouvernement ne cache plus son intention de réduire le rôle des départements, voire de les supprimer à terme. Cette disparition signifierait la fin d’un échelon essentiel pour la solidarité dans notre pays.

Nous assistons donc à la suppression des filets de sécurité, renforcée par la suppression massive de postes, que ce soit dans la fonction publique d’État ou au niveau local. 4 000 postes d’enseignants disparaîtront au niveau national, et ici dans le Doubs, on parle de ne pas remplacer 45 postes. Comme si les fonctionnaires n’étaient qu’une variable d’ajustement, alors même qu’ils sont au cœur de notre réponse à la crise sociale tout comme ils l’ont été au moment de la crise sanitaire. Leur travail est essentiel, mais aujourd’hui, on les sacrifie sur l’autel de la rigueur budgétaire.

Au niveau départemental, certains services sont déjà en souffrance et nécessitent plus de personnel, et non moins. Nous arrivons à un point où vous proposez lors d’un rapport de ne plus assurer des missions cruciales comme la sécurité sur nos routes et nous verrons que cette décision risque de mettre en danger des salariés doubiens. Cela est inacceptable.

Cette séance sera aussi l’occasion d’aborder le budget alloué aux collèges. Je tiens à avoir ici une pensée pour notre collègue, Rémi Nappey, qui en 2017, s’opposait fermement, au nom de notre groupe, à la décision de transférer la gestion de la viabilisation énergétique aux établissements scolaires. Aujourd’hui, 7 ans après, vous revenez en arrière ! Là encore je pourrai à nouveau rappeler « on vous l’avait bien dit » !

Alors, chers collègues de la majorité, quand certains d’entre vous abordent quelquefois un air condescendant à notre égard, peut-être serait-il bien d’  écouter nos propositions et nos remarques.

 En 2017, on nous disait que cela responsabiliserait les chefs d’établissement, comme si ces derniers étaient enclins à gaspiller l’argent public. Mais au final, le département a dû faire face à une inflation record des coûts de l’énergie, avec une moindre capacité à réaliser des achats groupés.

Combien cela nous a-t-il coûté ?   Ce sont ces décisions hasardeuses qui ont fragilisé nos finances publiques.

En conclusion, mes chers collègues, nous attendons peu de choses concernant ce débat sur les orientations budgétaires tant que nous n’aurons pas une véritable politique fiscale juste et équitable au niveau national, tant que nous ne retrouverons pas nous, collectivités, une indépendance fiscale. Nous n’avons même plus à arbitrer entre telles ou telles orientations budgétaires puisque nous n’avons plus la capacité budgétaire de mener de réelles politiques publiques.

Je vous remercie

Fermeture de Piquemiette : une décision logique mais brutale et des subventions non légales

Le groupe DSES est en accord avec la fermeture du secteur de Piquemiette de la station de ski de Métabief, une décision votée le 12 septembre lors du Conseil syndical du SMMO par Raphaël Krucien et Claude Dallavalle. Le modèle de transition d’une station de moyenne montagne cité en exemple a été rattrapé par la réalité du réchauffement climatique et la situation budgétaire.

Cette décision programmée s’impose, c’est le sens de l’histoire, cela marque le début de la fin du ski à Métabief. Le Département ne peut plus dépenser sans compter des millions d’euros d’argent public par an pour soutenir une station condamnée par le manque de neige, ce que nous disons depuis déjà longtemps. C’est d’autant plus criant que, ce matin, les professionnels du secteur de l’enfance manifestaient devant l’hôtel du Département pour dénoncer la dégradation des conditions de travail de l’ensemble du secteur médico-social et la faillite du système de protection de l’enfance.

En accord avec cette décision, nous dénonçons la brutalité de l’annonce à quelques semaines du début de la saison hivernale alors que cela était acté depuis cet été. Ni les élus, ni les commerçants, ni les habitants n’ont été associés. Même les élus du Conseil syndical du SMMO n’avaient pas connaissance du rapport qui explore les différents scénarios du futur de la station de Métabief au moment du vote le 12 septembre.

Outre le constat bien établi que le déficit du SMMO est structurel et non conjoncturel, le rapport rendu par un cabinet d’audit apporte aussi éclairage juridique intéressant : la subvention d’équilibre que le Département verse est illégale. En effet, les statuts d’un SPIC (Service Public industriel et commercial) comme l’est le SMMO, ne peuvent pas contraindre ses membres à verser une cotisation, et encore moins à combler un déficit…

Pour rentrer dans les clous réglementaires, le DSES a demandé et obtenu l’insertion d’une note au rapporteur pour modifier la seule délibération à l’ordre du jour de cette Assemblée Départementale et qui prend acte de la nécessité pour le SMMO d’engager la réflexion portant la révision statutaire sur son volet financier et comptable.

Sans cette révision statutaire, toutes subventions à venir du Conseil Départemental ou de la Communauté de Communes des Lacs et Montagnes du Haut Doubs (CCLMHD), les deux membres du SMMO seront illégales, comme l’ont été déjà toutes les précédentes. Comment cela a été possible, malgré les précédents audits et le contrôle de légalité de la préfecture qui a validé à chaque fois les statuts du SMMO ?

En tout état de cause, c’est une opportunité pour revoir les modalités de financement et inclure d’autres communautés de communes, comme celle du Grand Pontarlier qui reste mutique sur la situation. Les privés qui le voudraient pourraient aussi prendre leur part dans ce qui pourrait être une SCIC. Une piste à explorer pour sauver la station de Métabief.