Un budget 2026 de récession pour le Département du Doubs

La majorité n’ose pas l’assumer, mais le budget 2026 du Département du Doubs est bien un budget de récession. Les dépenses de fonctionnement sont en quasi-stagnation et n’évoluent que de 0,3 % par rapport au montant voté en 2025. En prenant en compte une inflation de 1,3 %, comme le prévoit le Département, les dépenses de fonctionnement sont en baisse.

Pour masquer cette réalité, la majorité a changé sa méthode de comparaison. Au lieu de se baser sur le budget voté, elle utilise pour la première fois le compte administratif projeté, c’est-à-dire l’estimation précise des dépenses effectivement réalisées à quelques jours de la fin de l’année. Et, surprise ou magie, cette fois, les dépenses de fonctionnement apparaissent en hausse artificielle de 3,1 %.

Cette manipulation soulève des questions sur la gestion financière du Département en 2025. Le compte administratif projeté est largement inférieur au budget voté. Plus étonnant encore, il est même inférieur au budget primitif 2025, malgré les rallonges budgétaires votées. S’il est normal de ne pas mobiliser entièrement un budget prévisionnel, la différence est cette année beaucoup trop importante pour être liée aux aléas courants.

Cela pose un sérieux problème de transparence : soit les budgets supplémentaires votés en 2025 n’ont pas servi, soit les baisses de budget connues n’ont pas été intégrées aux décisions modificatives. La première hypothèse est peu probable, car sur 11,7 M€ de rallonges diverses, presque 7 M€ concernent les dépenses de RSA, largement sous-évaluées.

Au total, en additionnant les rallonges budgétaires avec la différence de 15,3 M€ entre le compte administratif 2025 projeté et le budget voté 2025, nous arrivons à 27 M€ de dépenses votées dans le budget qui n’ont pas été affectées. Quand la Présidente affirme qu’il faut maîtriser les dépenses, « parce que la rigueur, c’est la liberté d’agir », nous avons l’impression d’être dans un mauvais rêve et nous aimerions savoir comment cette liberté s’est exercée.

Quelles politiques ont fait les frais de ces économies cachées ? Pourquoi n’ont-elles pas été intégrées à la dernière modification budgétaire votée il y a un mois, qui n’intégrait que des hausses ?

La prévention fait les frais de cette rigueur budgétaire, avec une baisse du soutien aux relais parentaux et à la prévention spécialisée. La politique de l’eau en subit également les conséquences. Bon nombre de politiques font les frais de cette rigueur budgétaire.

Nous avons appris une nouvelle inquiétante lors de cette Assemblée. Pour la première fois, faute de ressources suffisantes et dans l’attente de la loi de finances, la Présidente admet être dans l’incapacité de savoir si elle sera en mesure de rénover un autre collège après celui de Sancey. Si le Département avait suivi son plan de rénovation sans procrastiner pour privilégier d’autres investissements, 7 à 8 collèges auraient dû être rénovés à la rentrée 2028. Au final, nous n’en aurons sûrement qu’un, deux tout au mieux…

La majorité a aussi refusé notre demande de mission d’information sur la politique d’aide économique. Dans un contexte de contrainte budgétaire, le Département avait fait le choix de consacrer 3,7 M€ sur 3 ans à cette politique optionnelle. Alors que c’en était la justification principale, seulement 8,5 % du budget a été consacré au maintien des services en milieu rural, avec seulement 7 dossiers.

L’essentiel du budget est consacré à l’immobilier d’entreprise, avec 64 projets soutenus. On peine à comprendre pourquoi telle entreprise a été aidée et pas une autre, pourquoi on aide une entreprise qui verse plus d’un million d’euros de dividendes à son actionnaire unique, ou encore celle d’un agent immobilier du Haut-Doubs pour qu’il achète un local. C’est sur l’essentiel de ces aides que la question de la pertinence du soutien départemental est posée.

Pire, sur 64 subventions versées, 28 l’ont été non pas à des entreprises, mais à des SCI détenues par leurs dirigeants. Non seulement le Département n’a pas les moyens de mener une politique sérieuse de soutien économique à la hauteur des besoins de notre Département en proie à une désindustrialisation, mais en plus, il finance le patrimoine privé des entrepreneurs en subventionnant leurs SCI. La raison, connue, a été avouée en Assemblée par la majorité : il est plus facile de transmettre le capital d’une SCI que celui d’une société.

La politique de soutien économique du Département est non seulement inefficace, mais elle contribue directement à la course à l’optimisation fiscale. À l’heure où l’on se plaint du manque de ressources publiques, alors que le Département peine à assurer l’exercice de ses compétences obligatoires, c’est un terrible symbole.