Un budget 2025 au seuil de la rupture

Commentaires sur le rapport de présentation générale du Budget prévisionnel 2025 du Département du Doubs

Baisse de l’épargne brute en 2025 pour atteindre 37 M€ alors qu’elle était encore de 44 M€ au BP 2024, soit une chute de plus de 15% en un an malgré le plan de rigueur et d’austérité que vous avez mis sur pied. Et cela avant les dispositions redoutées prévues dans le projet de loi de finances à venir.

En conséquence, notre taux d’épargne brute, déterminé par le rapport entre l’épargne brute et nos recettes de fonctionnement qui permet d’analyser la santé financière d’une collectivité est historiquement faible et s’écroule à 6.3%. Vous pointer le fait que l’on est en dessous du seuil de vigilance de 10%. Vous minimiser la situation, parce que nous avons en fait dépassé le seuil d’alerte fixé à 7%…

Nous n’avions déjà plus beaucoup de marges de manœuvres en perdant notre autonomie fiscale et au regard de nos missions de service public, mais avec cette situation financière dégradée, qui « s’effondre » et « s’écroule » comme vous le mentionnez dans ce rapport, elle se réduit presque à néant.

Cette réalité financière tranche avec les chiffres que vous mentionnez dans votre tribune du dernier VDD. Vous écrivez, et je vous cite : « Heureusement notre majorité a fait preuve de sérieux budgétaire et a réduit la dette de près de 20% en 9 ans pour préserver notre capacité d’investissement, après avoir hérité d’une situation financière dégradée par la précédente majorité de gauche » !

Avez-vous un problème avec les chiffres ou avec la vérité ? Nous avons déjà dû démentir votre bilan que vous avez présenté à la presse du nombre de blessés et de morts après le passage au 90 km/h. Parce que nous avez fait les calculs. Quand on compare l’encours de la dette entre 2014 et 2023, ou entre 2015 et 2024, on n’est pas à -20%, mais plutôt à -13%.

Et pourquoi n’avoir pas mentionné la capacité de désendettement ? En 2014, elle était de 4.4 années, en 2015 de 4.8 années. En 2023 : 4.5 années et aujourd’hui ? 7 années !

Et ce n’est pas pour préserver notre capacité à investir au cœur de notre champ de compétence que vous avez œuvré à désendetter un peu nos finances jusqu’à cette année. Vous avez choisi de freiner l’investissement nécessaire à notre patrimoine, comme les collèges ou nos propres bâtiments. Et vous continuer à le faire avec ce BP, qui repousse encore les travaux de modernisations de nos collèges et nous courrons le risque de revoir les programmes d’investissements votés ces dernières années.

La réalité, c’est qu’aujourd’hui nous n’avons plus la capacité d’investir. Au fil du temps, nous arrivons aujourd’hui avec 476 M€ d’Autorisations de Programme. Soit autant d’argent que vous avez mis sur la table mais qui ne sont pas encore dépensé. Pour cette année, vous n’avez pas voulu inscrire d’AP au-delà de 2025 et vous engagez 85 M€ de crédit de paiement, soit l’argent qui sera vraiment dépensé en 2025.

A ce rythme, il nous faudrait 5 ans et demi pour finaliser ces différents programmes. Ce qui nous amène au-delà de votre mandat. Pouvez-vous nous dire aujourd’hui que tout sera bien réalisé ? N’allez-vous pas être contraint à des renoncements importants ?

Pour avoir une lisibilité pluriannuelle de votre action et de vos projections, nous avons besoin de connaitre ce qui est réalisé, et ce qui reste à réaliser et de l’actualisation de vos programmes.

Vous avez aussi désendetté en contraignant la hausse du fonctionnement et cela s’est fait sur la trésorerie de nos partenaires. Sur le mandat de 2015 à 2021 quels étaient les taux directeurs des établissements pour personnes âgées ? pour les personnes handicapées ? pour les enfants confiés ? Ils étaient extrêmement bas : +0%, +0.5%, parfois +1%. Beaucoup trop bas pour faire face à la hausse des besoins.

Depuis l’après COVID et les revalorisations décidées par l’Etat, oui les taux directeurs ont retrouvé un peu de raison. Mais il y a un passif, et cela contraint encore aujourd’hui un certain nombre de structures.

On a aussi pris sur la trésorerie des collèges, on a pris les 7M€ du fond de réserve DMTO cette année, notre dépôt au Trésor est parmi les plus faibles à l’habitant, et on va prendre cette année sur la trésorerie du COS. L’Etat nous assèche et nous nous asséchons nos partenaires ?

Alors certes, cela n’est ni la vocation des collèges ou du COS de mettre de l’argent de côté. Mais quand plus personne n’aura de trésorerie, qu’allons-nous faire ? Nous n’aurons plus aucune marge de manœuvre. L’Etat nous assèche et nous asséchons nos partenaires ? Soit directement, soit en retardant les paiements aux structures et aux associations ? En baissant les subventions aux associations ?

Les seuils de vigilance et d’alerte sont dépassés, pour nous mais peut-être surtout pour nos partenaires, ceux qui font vivre nos politiques de solidarité, nos EHPAD, le secteur du maintien à domicile, les structures liées au handicap, à l’insertion, aux jeunes, à tous ceux qui irriguent le territoire de sport, de culture, de vivre ensemble. Non seulement les seuils de vigilance et d’alerte sont dépassés, mais c’est maintenant le seuil de rupture que nous devons craindre.

Liminaire du BP 2025

Discours Liminaire prononcé le 16 décembre 2024 par Raphaël KRUCIEN en ouverture de l’Assemblée Départementale consacrée au budget prévisionnel 2025

Madame la Présidente, chers collègues,

Ce budget prévisionnel 2025 est un peu spécial. Et pour cause, ni vous, ni personne, ne connaissez le montant des dotations que l’Etat versera au Département l’année prochaine.

C’est une situation particulière.

Car chacun en conviendra, construire un budget sans avoir une idée claire de ses recettes est un exercice périlleux. Forcément incertain.

Il y a deux mois, au moment de débattre des orientations budgétaires, nous vous avions demandé de le repousser. D’attendre le vote de la loi de finances avant de finaliser un budget correspondant à la réalité plutôt que d’en adopter un qui serait immédiatement caduc.

Beaucoup de collectivités ont décidé de reporter ce vote en attendant de connaitre le sort que l’Etat leur réserverait.

Mais force est de constater que, mi-décembre, nous n’avons toujours aucune visibilité…

Pire, rien ne permet de dire qu’une clarification verra le jour dans les prochaines semaines ou les prochains mois alors que vous aviez décidé d’une solution alternative : soumettre au vote une décision modificative exceptionnelle en février censée prendre en compte l’impact de la loi de finances.

D’ailleurs, peut-être faudra-t-il l’attendre encore un bon moment…

Le déroulement des événements donne finalement raison à votre stratégie, en tout cas pour le moment… Il faut savoir le reconnaitre.

Il faut avancer. On ne peut pas se permettre d’ajouter du flou au flou, nous avons le devoir d’être au rendez-vous de nos citoyens. Donner un cap comme vous vous plaisez à la dire.

Même dans le brouillard. Même si la machine de l’Etat s’enraye et qu’il n’a pas la capacité de voter lui-même son budget.

L’énorme problème, c’est que votre cap ne répond pas aux besoins.

Certaines politiques, certains soutiens, certains dispositifs, certaines associations, certaines personnes, et les plus faibles notamment, seront fatalement victimes de cette tempête financière

La situation budgétaire du Département est dans le rouge, et proche du noir. Le paquebot prend l’eau de toute part. Pour éviter le naufrage, vous actez un plan de rigueur, que vous appelez plan de maitrise des dépenses.

Ce plan, vous l’avez préparé de longue date. Vous avez même commencé à le déployer dès mars, évidemment sans en faire la publicité à ce moment-là.

Vous avez écopé, opéré un travail de « quoi qu’il en coupe » qui vous permet aujourd’hui de présenter avec fierté un budget identique au quasi-CA 2024 en volume de recettes et de dépenses.

Un budget qui stagne donc avec des investissements en baisse alors que nos besoins augmentent. Un budget qui pourrait en plus se voir amputer en plus de 25M€ si le gouvernement Bayrou suivait celui de Barnier.

Vous savez, la dette et le déficit nous préoccupe aussi.

Mais ce qui nous préoccupe davantage encore, c’est de rendre le monde vivable pour nos enfants.

La dette n’est pas juste un indicateur comptable pour les marchés financiers ou les agences de notation, c’est l’instrument indispensable pour servir l’avenir. Et nous savons que le sujet de l’enfance nous occupera beaucoup.

Malheureusement, les choix que vous faites aujourd’hui empêchent la collectivité de se projeter vers l’avenir. Chose sans doute inédite, on ne s’apprête à voter des autorisations de programme ou d’engagement que pour l’année qui vient. Et on reporte les décisions nécessaires pour mettre en œuvre un programme voté : les rénovations des collèges. Pierre angulaire de notre plan climat et témoignage de respect à l’égard de nos enfants.

Pour vous, l’horizon s’arrête à 2025. On navigue à vue, contraint par un mauvais courant sans penser au futur. Vous construisez un budget d’insécurité, sans vision, avec pour seule boussole la cure d’austérité que vous souhaitez imposer aux Doubiennes et aux Doubiens.

Certes, vous avez un stock d’AP résiduelles conséquente. Mais nous sommes très inquiets sur ce point.

N’est-il pas trop conséquent ? Nous craignons que vos dépenses faramineuses sur d’autres programmes empêchent la collectivité d’agir sur l’essentiel. Vous renoncez déjà avec ce budget à certains crédits qui auraient dû être affecté à la rénovation des collèges ou au Fonds Additionnel Transition Climatique et Energétique, qui nous apparait comme potentiellement délaissé sur l’hôtel de la rigueur.

Or, c’est cette dette-là, qui sert l’avenir. Certainement pas les investissements pour des projets du passé ou qui relèvent du faste et de l’accessoire

Ce budget c’est un peu votre constat d’échec. Vous n’avez plus les moyens de vos ambitions et vous subissez en plus les choix de ceux qui veulent imposer l’austérité à l’ensemble du pays. Vous affichez même avec fierté votre démarche de politique de rigueur qui conduit à une économie de 30M€.

Pour garder la face, tenter de conjurer un asséchement plus grand encore, vous vous déclarez en résistance. Mais en résistance contre qui exactement ?

En résistance contre l’Etat et son éphémère gouvernement Barnier qui voulait amputer les recettes de notre département de 25 M€ supplémentaires ?

Doit-on vous rappeler qu’il s’agit de votre propre famille politique qui se pense légitime à gouverner la France avec 6% des voix aux législatives ?

Nous avons un nouveau premier ministre depuis vendredi, François Bayrou qui devrait s’inscrire dans la même logique, Est-ce que vous allez poursuivre votre résistance ?

A bien y penser, c’est quand même incroyable de songer que vous vous plaignez de subir les conséquences directes du marqueur le plus emblématique de l’idéologie de votre courant politique : la baisse de la fiscalité à tout prix. Cela n’a jamais été autant si décalé par rapport à notre réalité. Mais votre camp politique persiste.

Alliée des Macronistes, la droite française se bat avec constance pour diminuer toujours plus les impôts et en particulier ceux des plus fortunés du pays

Forcément, les recettes en pâtissent comme le montrent les chiffres depuis 2017. On se prive de capitaux indispensables pour garantir notre modèle social et engager les dépenses nécessaires à l’adaptation au changement climatique.

Et avec moins de recettes, nous n’avons que deux choix : vivre au-dessus de nos moyens avec la dette ou dépenser moins. Aujourd’hui, c’est vers la rigueur et l’austérité que l’on tend.

Alors que comptez-vous faire ? Quelle est votre vision ? Tout dégrader d’années en années ?

Regarder ligne par ligne les économies que l’on peut faire en bon comptable alors que l’on est déjà au bord de la rupture ?

Allez-vous suspendre le versement du RSA et arrêter la prise en charge des nouveaux mineurs accompagnés au 1er janvier si l’Etat ne revient pas sur les ponctions budgétaires prévues en 2025 comme vous l’avez annoncé avec tous les départements de droite ?

Voulez-vous vraiment organiser l’insécurité sociale et pointer les migrants comme responsables de notre situation budgétaire ?

Ou alors préférez-vous peut-être faire appel au mécénat pour assurer les missions de service public dont vous avez la charge, comme vous le proposez de manière hallucinante avec la politique de l’enfance ? C’est ça votre modèle ? Inciter à la charité comme au XIXème siècle plutôt que de réclamer plus de justice fiscale et sociale comme le réclame l’écrasante majorité de nos concitoyens ?

Nous n’avons clairement pas la même idée de l’avenir.

Rien n’est facile ni complétement prévisible en politique. Mais nous avons une proposition de bon sens à vous faire, une vieille idée toute simple qui permettrait de redonner aux Départements la capacité à assurer le financement de l’ensemble de leurs compétences : créer un nouvel impôt sur les hauts patrimoines.

C’est le vœu que nous vous avons présenté ce matin et qui sera débattu en fin de session.

Nous croyons que pour le bien de tous, chacun doit prendre ses responsabilités et dépasser les clivages galvaudés qui sclérose le débat public et nous éloigne des réalités de notre société. Nous sommes d’accord, entrons en résistance oui. Mais pour nous redonner les moyens d’agir avec les bons outils, pas avec des renoncements.

Parce que l’irresponsabilité n’est pas du fait de ceux qui censurent un Gouvernement minoritaire.

L’irresponsabilité vient du plus haut sommet de l’Etat, avec un Président qui n’accepte pas le résultat des urnes et qui s’entête à construire un gouvernement sans légitimité démocratique.

Le responsable de la situation est à l’Elysée. Montrons-lui ensemble que nous sommes capables de trouver des solutions nouvelles avant qu’il ne soit trop tard, et que l’on perde totalement notre crédit déjà bien abîmé.

Ce qui est en jeu, c’est notre capacité à vivre ensemble dans le présent et dans le futur. La responsabilité, c’est répondre à l’intérêt supérieur de la Nation. Et donc ouvrir le chantier de la justice fiscale dans le pays.

Alors oui c’est très dur de gérer un département sous un gouvernement de droite.

C’est dur pour vous et ce serait également dur pour nous à votre place.

Cette gouvernance provoque l’insécurité.

Retour au 90 km/h : un bilan désastreux

Lors du débat sur le relèvement de la vitesse à 90 km/h sur les départementales, nous avions alerté sur ce risque : rouler plus vite pour ne gagner que quelques secondes est un non-sens préjudiciable aussi bien sur le plan écologique que sécuritaire.

Et le premier bilan de cette mesure est catastrophique. En un an, le nombre d’accidents a augmenté de 47% sur les RD après le passage à 90 km/h alors que les accidents n’ont augmenté que de 9.5% sur l’ensemble du réseau routier du Doubs. Sur les départementales concernées, le nombre de blessés a augmenté de 33%, celui des blessés graves de 55%…

La seule donnée positive est la baisse de 25% du nombre de morts. Un chiffre à nuancer, car les données s’arrêtent au 31 juillet dernier. Malheureusement, les drames routiers se sont succédés depuis cette date. Alors que la cause principale des accidents de voiture reste la vitesse, le relèvement de la vitesse à 90 km/h est un très mauvais signal qui ajoute en plus de la confusion sur les routes. Comment l’automobiliste peut s’y retrouver entre des limitations à 30, 50, 70, 80, 90 et 110 km/h ?

Un autre vote pourrait contribuer à dégrader la sécurité routière. Outre les baisses de crédits sur cet axe, la politique de déneigement a été revue et entérine une diminution des amplitudes d’interventions pour les RD de niveau 2. La praticabilité de la moitié du réseau ne sera plus assurée après 20h et aléatoirement avant 7h.

Un débat d’orientation et un budget 2025 caduc avant sa présentation

Les débats d’orientations budgétaires 2025 du Département se sont tenus ce jour dans un climat inédit alors que la loi de finances 2025 n’était pas encore votée. Pire, personne ne peut dire qu’elle en sera sa teneur alors que l’Etat demande 5 milliards d’euros aux collectivités locales.

Malgré notre demande de report adressée à la Présidente, l’exécutif maintien sa volonté de voter le budget primitif du Département les 16 et 17 décembre malgré les incertitudes majeures qui pèsent sur la politique nationale et ses répercussions au niveau des recettes de la collectivité.

La justification est louable : entamer un acte de « résistance » face .. à la propre famille politique de la majorité qui met en péril la poursuite des actions menées par le Département en le contraignant à mener une politique de rigueur. Mais ce choix condamne le Département à préparer un budget 2025 caduc avant même sa présentation.

Plutôt que de toujours chercher des économies, pourquoi ne parle-t-on jamais des recettes ? Pourquoi ne pas revenir à une fiscalité plus juste, en imposant davantage les plus riches, qu’il s’agisse des ménages ou des grandes entreprises ? C’est par cette voie que nous pourrions réellement financer les politiques publiques dont notre pays a besoin, et non en étranglant les collectivités.

Discours liminaire de Magali Duvernois

Madame la Présidente,

Mesdames et Messieurs les Conseillers départementaux, chers collègues,

J’étais tentée de commencer ce liminaire par « on vous l’avait bien dit » et reprendre cette expression comme un leitmotiv tant ce qui nous arrive aujourd’hui était prévisible.

En effet, on nous répète souvent qu’il faut parler de politique locale et oublier la politique nationale. Mais soyons clairs : en ce jour, où nous devons débattre des orientations budgétaires pour 2025 ; nous ne pouvons plus l’ignorer : les décisions prises à Paris ont des conséquences directes sur notre budget ici, dans le Doubs. Le gouvernement nous demande 5 milliards d’économies. Ce n’est rien de moins que le résultat d’une politique fiscale catastrophique menée depuis plusieurs années. Une politique fiscale qui interroge systématiquement les dépenses pour mieux cacher les cadeaux faits aux plus riches.

Prenons un exemple simple. Le gouvernement demande 5 milliards d’économies aux collectivités locales alors que la suppression de la CVAE, cette taxe sur la Valeur Ajoutée des Entreprises représente un manque à gagner de 9 Milliards soit quasiment le double de ce qui est demandé aux collectivités locales. Mme la Présidente, chers collègues de la majorité, nous aurions pu croire en votre indignation face aux efforts demandés aux collectivités mais, mais, lorsque nous vous avions proposé une motion dénonçant la suppression de cette taxe, vous aviez refusé de la voter en arguant le fait qu’il fallait laisser le gouvernement, votre gouvernement  de droite puisqu’il avait promis de compenser cette perte pour les collectivités …. Nous voyons le résultat un an après  !!!!

Force est de constater que cette promesse n’a pas été tenue et que c’est nous, collectivités locales, qui payons aujourd’hui le prix de ces choix.

Plutôt que de toujours chercher des économies, pourquoi ne parle-t-on jamais des recettes ? Pourquoi ne pas revenir à une fiscalité plus juste, en imposant davantage les plus riches, qu’il s’agisse des ménages ou des grandes entreprises ? C’est par cette voie que nous pourrions réellement financer les politiques publiques dont notre pays a besoin, et non en étranglant les collectivités.

Nous devons arrêter cette politique fiscale qui a vu progressivement les plus riches et les grandes entreprises payer de moins en moins d’impôts : faut-il rappeler la suppression de l’ISF, l’instauration de la FlatTax et la CVAE dont je viens de parler… Ainsi, l’Observatoire des inégalités, confirme que les 500 plus grandes fortunes ont vu leur patrimoine multiplié par 4 en 10 ans, que les 10 premiers Milliardaires ont vu leur fortune doublée oui doublée depuis 2017 ; les plaçant ainsi parmi les plus riches au monde. Dans le même temps, le taux de pauvreté a augmenté atteignant 14,5 % , touchant notamment les jeunes et les familles modestes. Les enfants de moins de 18 ans étant particulièrement touchés avec un taux de 20,4 % . Et aujourd’hui, comble du cynisme, ce sont toutes ces personnes fragiles qui risquent d’être encore plus fragilisées. 

En effet, il est important de rappeler que les départements supportent aujourd’hui plus de 40 % de l’effort demandé aux collectivités territoriales. Cet effort, disproportionné, met en péril nos politiques de solidarité. Ne l’oublions pas, c’est le département qui gère le RSA, la protection de l’enfance, l’aide aux personnes handicapées et aux personnes âgées.

 En fragilisant ces budgets, ce sont ces citoyens que nous abandonnons. Ce sont les personnes les plus précaires que nous pointons du doigt comme boucs émissaires.

Et ne faisons pas l’erreur de les stigmatiser davantage. On parle souvent de fraude sociale, mais rappelons les chiffres : la fraude aux prestations sociales représente 1,1 milliard d’euros, contre 15,2 milliards pour la fraude fiscale. Où est le vrai scandale ? Et pourtant, près de 30 % des ayants droit n’accèdent même pas aux prestations sociales qui leur sont dues, notamment 34 % pour le RSA et 50 % pour le minimum vieillesse. Ce sont 4 milliards d’euros en 2022 qui ne sont pas réclamés.

Cette politique d’austérité brutale alimente également la montée de l’extrême droite. Le Rassemblement National, loin de défendre les collectivités locales, a demandé encore plus d’efforts de leur part. Ils ont proposé 15 milliards d’économies supplémentaires pour les collectivités locales lors de la présentation de leur contre-budget à l’Assemblée Nationale. Cette surenchère d’austérité fragilise encore plus nos territoires et nos services publics, tout en nourrissant un discours populiste dangereux. Et comble de l’immoralité, le RN attise la haine des plus fragiles pour récupérer leurs voix alors que ce sont eux qui les plongent dans une précarité toujours plus grande.

Le sacrifice de nos politiques publiques fait ainsi craindre le pire pour l’avenir, y compris la poursuite de la montée des extrêmes. Et n’oublions pas, cette cure d’austérité drastique fait peser une menace sur l’existence même des départements.

 Le gouvernement ne cache plus son intention de réduire le rôle des départements, voire de les supprimer à terme. Cette disparition signifierait la fin d’un échelon essentiel pour la solidarité dans notre pays.

Nous assistons donc à la suppression des filets de sécurité, renforcée par la suppression massive de postes, que ce soit dans la fonction publique d’État ou au niveau local. 4 000 postes d’enseignants disparaîtront au niveau national, et ici dans le Doubs, on parle de ne pas remplacer 45 postes. Comme si les fonctionnaires n’étaient qu’une variable d’ajustement, alors même qu’ils sont au cœur de notre réponse à la crise sociale tout comme ils l’ont été au moment de la crise sanitaire. Leur travail est essentiel, mais aujourd’hui, on les sacrifie sur l’autel de la rigueur budgétaire.

Au niveau départemental, certains services sont déjà en souffrance et nécessitent plus de personnel, et non moins. Nous arrivons à un point où vous proposez lors d’un rapport de ne plus assurer des missions cruciales comme la sécurité sur nos routes et nous verrons que cette décision risque de mettre en danger des salariés doubiens. Cela est inacceptable.

Cette séance sera aussi l’occasion d’aborder le budget alloué aux collèges. Je tiens à avoir ici une pensée pour notre collègue, Rémi Nappey, qui en 2017, s’opposait fermement, au nom de notre groupe, à la décision de transférer la gestion de la viabilisation énergétique aux établissements scolaires. Aujourd’hui, 7 ans après, vous revenez en arrière ! Là encore je pourrai à nouveau rappeler « on vous l’avait bien dit » !

Alors, chers collègues de la majorité, quand certains d’entre vous abordent quelquefois un air condescendant à notre égard, peut-être serait-il bien d’  écouter nos propositions et nos remarques.

 En 2017, on nous disait que cela responsabiliserait les chefs d’établissement, comme si ces derniers étaient enclins à gaspiller l’argent public. Mais au final, le département a dû faire face à une inflation record des coûts de l’énergie, avec une moindre capacité à réaliser des achats groupés.

Combien cela nous a-t-il coûté ?   Ce sont ces décisions hasardeuses qui ont fragilisé nos finances publiques.

En conclusion, mes chers collègues, nous attendons peu de choses concernant ce débat sur les orientations budgétaires tant que nous n’aurons pas une véritable politique fiscale juste et équitable au niveau national, tant que nous ne retrouverons pas nous, collectivités, une indépendance fiscale. Nous n’avons même plus à arbitrer entre telles ou telles orientations budgétaires puisque nous n’avons plus la capacité budgétaire de mener de réelles politiques publiques.

Je vous remercie