Je souhaiterais introduire mes propos par un hommage aux centaines, aux milliers de morts en Méditerranée. Des hommes, des femmes et des enfants qui fuient la misère chez eux, des guerres et, bientôt, des conditions climatiques trop hostiles pour espérer un avenir meilleur en Europe. L’ONU alertait déjà en avril : le premier trimestre 2023 a été le plus meurtrier depuis 2017 pour les migrants qui tentent de rejoindre l’Europe en traversant la Méditerranée. Au moins 441 vies perdues entre janvier et mars, déclarait l’organisme international.
Des morts sans bruits, plus de 20.000 confirmés depuis 2014 écrit l’ONU dans ce même communiqué. Un naufrage a un peu plus fait parler de lui récemment, et je ne parle pas du sous-marin perdu au fond de l’Océan à proximité du Titanic. Mais d’un vieux chalutier rouillé, surchargé de plus de 750 migrants entassés sur le pont et dans la cale. Il est parti de Lybie et a sombré le 14 juin au large des côtes de la péninsule du Péloponnèse en tentant de rejoindre la Grèce après avoir signalé des avaries. Impossible d’établir un bilan, 82 corps ont été retrouvés à ce jour, il y a 104 rescapés. Au total, cette catastrophe a sans doute tué entre 300 et 650 personnes.
Les départements sont en première ligne de l’accueil des migrants avec l’obligation qui leur revient de fournir une assistance aux mineurs étrangers non accompagnés, les MNA. La France connait une hausse des arrivées sur son sol depuis le début de l’année et se trouve face à des défis importants pour pouvoir assurer leurs missions d’humanité à ce sujet. Nous savons bien que l’organisation de cet accueil est une mission très compliquée. On peut interroger la politique du département sur la gestion des places et se demander si la hausse conséquente de 1.12 M€ sera à même de répondre aux défis à venir.
Et de défis, le Département n’en manquent pas. Tout comme ses partenaires. Nous avons relayé dans le dernier Vu du Doubs la lettre ouverte publiée par la presse régionale par tous les acteurs du social et du médico-social du département. Augmentation des besoins, diminution des moyens, difficultés de recrutement… Les signaux sont au rouge et les réponses des institutions ne sont pas à la hauteur. Nous réclamons un grand chantier sur l’attractivité de ces métiers qui doit déboucher sur des résultats concrets et mesurables. Il doit être mené de manière urgente et de concerts avec tous les acteurs. Il faut retenir ceux qui exercent ces métiers en leur accordant une meilleure reconnaissance, à la fois salariale et sur les conditions de travail.
Il faut réfléchir à une vraie politique à ce sujet, nous sommes effarés de constater que les pouvoirs publics sont en peine pour, simplement, établir une vision globale et exhaustive de l’offre de soins à l’échelle territoriale. Effarés d’entendre que le Département ne soit pas en mesure d’établir des dialogues de gestion et instaurer un cadre de communication régulier et collaboratif avec tous ses partenaires, que ce soit dans le domaine du médico-social ou ailleurs. Effarés du retard accumulé pour la définition et l’écriture de certains CPOM, ces contrats d’objectifs et de moyens, qui organisent l’offre de soins avec les structures. Ceux qui n’en ont pas les attendent avec impatience.
Nous avons de la peine à percevoir quelle est la politique départementale sur ce sujet. On fait des coups, on répond à des appels d’offres, comme c’est le cas sur l’habitat inclusif. Et c’est une très bonne chose de favoriser les alternatives à l’institution, de proposer des solutions intermédiaires entre le domicile et les EHPAD ou les foyers pour handicapés. Nous y reviendrons surement dans cette Assemblée. Et nous souhaitons, tout comme vous, que les zones non pourvues actuellement puissent l’être rapidement. Que l’ensemble du territoire soit couvert et qu’un nombre important de personnes puissent en bénéficier, le tout dans une logique de mixité, ce qui sera possible par la nouvelle aide sociale que vous proposez dans cette Assemblée.
Nous partageons ce choix et cette orientation. Mais dans une logique d’approche globale et de hausse des besoins, nous pensons que ses conséquences devraient être plus étudiées. En favorisant le maintien à domicile ou le développement de l’habitat intermédiaire, et c’est le cas aussi des placements éducatifs à domicile, les structures et les travailleurs sociaux observent une population accueillie en institution plus difficile en moyenne, plus dépendante, mais sans pour autant que le taux d’encadrement n’a été modifié. Voici, aussi, une piste qu’il faudrait creuser et trouver des solutions dans le cadre d’un partenariat renforcé avec les acteurs.
Et dans une société qui se délite de plus en plus, dans laquelle il devient de plus en plus difficile de se comprendre et de s’écouter, il faut absolument privilégier les instances de dialogue. Nous avons voulu engager le débat sur l’eau, dire les choses telles qu’elles sont sans se voiler la face, même si elles ne font pas plaisir. Il faut trouver rapidement des solutions applicables et parvenir à ce que l’on souhaite tous, du moins je l’espère, concilier les impératifs de production agricole et qualité de l’eau. Vous avez refusé notre Mission d’information et d’évaluation sur la pollution des rivières, ce qui ne donne assurément pas un bon signal. C’est regrettable et cela restera une faute majeure de votre mandat, mais nous savons que notre action a déjà fait bouger des lignes et a sans doute provoqué une prise de conscience chez certains.
Nous étions en dessous de la réalité dans notre présentation. Dans le dernier rapport scientifique consacré à la pollution des rivières du Doubs, le BRGM affirme dès son introduction dans un constat sans appel que le cheptel bovin est responsable d’environ ¾ des apports totaux en azote et en phosphate et, plus loin, que l’agriculture est la source de 90% des apports d’origine anthropique sur les bassins versants. Ces chiffres doivent nous faire relativiser sur les causes multifactorielles qui sont souvent évoquées pour éviter d’avoir à agir sur le principal levier. Et là encore, le dialogue sera nécessaire pour trouver des solutions intelligentes et ne pas sombrer dans la violence, d’où qu’elle vienne. C’est une urgence.
La société se tend, et les questions environnementales sont l’un des points de crispations les plus aigus. Pour la première fois, le gouvernement français vient de dissoudre un collectif écologiste, Les Soulèvements de la terre, qui fédère des centaines d’associations et des centaines de milliers d’individus qui souhaitent, simplement, un avenir désirable. Nous ne sommes pas pour la violence et regrettons son utilisation lors de certaines manifestations appelées par ce mouvement, certes radical, et qui entend s’attaquer frontalement aux causes des problèmes environnementaux. Nous regrettons également l’inaction des pouvoirs publics sur le sujet environnemental et, en tant que groupe politique attaché aux principes de la démocratie et de la République, nous nous inquiétons de la dérive liberticide et de l’atteinte à l’Etat de droit que représente cette dissolution, nous sommes inquiets des possibles attaques futures sur la liberté d’organisation ou de manifestation.